xbox 180
Société

Xbox 180

 
C’est une tradition : chaque année le gratin des communicants et des professionnels se réunit pour présenter au public les nouveautés vidéo-ludiques à venir et les tendances qui se profilent. Des tendances de communication des différents studios et fabricants sont ainsi dégagées. C’est lors de l’E3 à Los Angeles que se passe cette grande messe annuelle du jeu vidéo. L’édition de cette année, du 11 au 13 juin, nous a en outre permis de découvrir le futur de l’industrie pour les 5 ans à venir, puisqu’une nouvelle génération de console a été dévoilée au public. Et le moins que l’on puisse dire, c’est que les positions des différents constructeurs sont à présent claires.
Microsoft a présenté la One, dont nous vous avions déjà parlé. Ce qui a frappé lors de l’E3, c’est que la communication autour de ce nouveau produit a été confuse et approximative. Alors que les choix de la console sont tranchés, ce sont les points d’accroches qui ont étés soulignés, et qui se multiplient après l’annonce : nécessité d’une console toujours connectée, marché de l’occasion contrôlé, caméra en permanence branchée, prix élevé (500E contre les 400E de sa concurrente la PS4). Très vite, les média relayent ces informations, qui irritent le joueur et le client potentiel. Attaquée à répétition sur ces sujets, la marque a répondu de façon curieuse, avec un immobilisme qui pourrait parfois passer pour de l’impertinence. Don Mattrick, qui s’occupe du département Xbox de Microsoft, a ainsi incité les joueurs gênés par toutes ces annonces à… rester sur l’ancienne console, tout simplement :
«  – Heureusement, nous avons un produit pour les gens qui n’ont aucune forme de connectivité, qui s’appelle la Xbox 360.
– Donc, « restez sur 360″, c’est votre message… ?
– Eh bien, si vous avez zéro accès à Internet, c’est un appareil offline… »
La pression et l’incompréhension des médias ne semblait pas pouvoir faire plier la marque, tandis que les chiffres catastrophiques de pré-commande annonçaient un futur sombre pour la Xbox One.
Seulement, c’était sans compter la capacité de Microsoft à rebondir. L’annonce, postée le 19 juin, via un billet posté sur le blog Xbox Wire par le même Don Mattrick, sonne comme un coup de tonnerre : la Xbox One allait changer du tout au tout. Finie la connexion obligatoire, finie l’impossibilité du prêt des jeux, finie la disparition du bon vieux disque. La Xbox a écouté les critiques, les joueurs ont gagné. Un exemple en apparence d’une marque à l’écoute des retours de ses clients, et prête à se remettre en cause. Pour saisir l’importance de cette annonce, il faut rappeler que cette vision d’une Xbox connectée était pour Microsoft le futur du jeu vidéo. Les commentaires sont allés de bon train sur internet pour critiquer cette volte-face, et comme d’habitude sur Internet, les images pleuvent.

Si certains voient déjà en cette annonce la victoire des internautes et de leur protestation contre une console qui ne leur convenait pas, on peut également être plus lucide et penser que les préoccupations de Microsoft étaient davantage commerciales. Une console peu populaire est une console qui ne se vend pas.
Du reste, il est difficile d’inverser une première impression, et malgré cette copie corrigée, Microsoft risque bien de payer le prix fort pour avoir voulu imposer son modèle de force. Et les tacles du concurrent Sony ont su frapper là où ça fait mal :

Bref, il ne faut pas vendre la peau de l’ours avant de l’avoir tué : rien n’est encore fini dans cette guerre des consoles, et la communication y jouera à coup sur un rôle prépondérant.
 
Clément Francfort

Société

Playstation : cacher n'est pas jouer

 
La conférence était très attendue mercredi dernier à Los Angeles. Un parterre de journalistes est installé devant un homme, Andrew House, président de Sony entertainement, qui va leur présenter son dernier bijou : la Playstation 4. Le cadre reste celui auquel Sony et l’ensemble de l’industrie vidéoludique nous a habitué : une scène aux aspects technologiques et aux codes graphiques assumés. Des ronds, triangles, croix et carrés nous rappellent l’enjeu de cette conférence pour Sony, qui lance officiellement la bataille pour la prochaine génération de consoles avec son concurrent direct, Microsoft. Andrew House doit donc nous présenter un produit, dans un exercice qui s’inspire visiblement des keynotes, si populaires dans le monde des nouvelles technologies, popularité en grande partie due à Apple et sa façon particulière de présenter ses nouveaux produits.
Seulement ici, les journalistes repartiront sur leur faim. On a parlé de la Playstation 4. On connait ses fonctionnalités, ses jeux et même sa manette. Mais impossible de poser les yeux sur la console, qui n’a tout bonnement pas été présente lors de l’annonce. Un pari risqué pour Sony, mais nécessaire. Ne pas dévoiler ses cartes offre à sa console deux avantages.
Le premier est évidemment la possibilité de continuer à remanier la console, à la faire évoluer, à rajouter ou retirer des fonctionnalités sans avoir à se justifier, puisque la présentation n’était en aucun cas une présentation finale de la console. C’est un moyen de gagner du temps pour le développement, que l’on sait précieux quand on connaît la rapidité de l’évolution du marché – et de son obsolescence. Cette communication fantôme est donc un moyen de ne pas prendre d’engagement, tout en gardant un teasing : A quoi ressemblera cette nouvelle console ? Aura-elle bien les fonctionnalités annoncées ? Quel sera son prix ?
Le second avantage est lui aussi intéressant. Ce milieu est partagé entre trois acteurs principaux, qui sont donc en concurrence très rude et doivent chacun présenter leurs consoles et plans pour la génération à venir (la génération actuelle est présente depuis 2006-2007). En choisissant d’entourer sa console de mystère, Sony met la pression sur ses concurrents, qui ne peuvent se fier à des informations qui ne sauraient être définitives. C’est vrai pour Nintendo, dont la Wii U sorti il y a quelque mois risque d’être dépassée par la Playstation, mais c’est d’autant plus préoccupant pour Microsoft, qui n’a lui pas encore annoncé sa console. Le géant américain ne pourra pas décortiquer la présentation de Sony pour en évaluer les dangers, et présentera donc sa future console dans le noir pendant ce mois d’Avril.
Mais la console en elle même et ses fonctionnalités telles qu’elles ont été présentées à New York sont révélatrices d’une tendance, celle d’inclure les consoles dans une vision plus globale que celle du jeu. Et la Playstation 4 est d’autant plus intéressante qu’elle mise tout sur le « social gaming ». Il ne s’agit plus seulement de jouer dans son coin, ou à plusieurs sur Internet. La console va devenir un réel média social, dont la manette est l’illustration : en plus de l’aspect tactile rajouté, un petit bouton vient remplacer le traditionnel « Start ». Un bouton Share.

Via ce bouton, le joueur pourra publier ses scores, les comparer avec ses amis, et partager vidéos et photos tirées du jeu.
Mais le processus va plus loin. A tout moment, le joueur pourra « streamer » son jeu, et permettre à ses amis de le regarder jouer, un phénomène internet qui ne cesse de prendre de l’importance (on peut nommer le site www.twitch.tv, dédié uniquement à ce streaming de jeu vidéo). De plus, à n’importe quel instant, le joueur peut demander à un ami de prendre le contrôle de sa partie. Le jeu même se partage.
Enfin, pour  renforcer cette dynamique « social media », l’interface a tout d’un réseau social, avec possibilité de message, messagerie instantanée, conseil de jeux, achat de film, séries (en partenariat avec Netflix)…

Bref, la Playstation 4 s’annonce comme un objet multi-média qui s’éloigne du jeu, pour apporter à son utilisateur une expérience sociale. Elle communique intelligemment sur cette stratégie, tout en coupant l’herbe sous le pied de ses concurrents.
 
Clément Francfort