Affiche des pigeons - mouvement de protestation des entrepreneurs contre la loi sur la fiscalité 2012
Société

Le roucoulement des pigeons : entre victimisation et légitimation

 
Nés le 28 septembre sur Facebook, les Pigeons, Mouvement de Défense des Entrepreneurs Français, n’ont eu besoin que de quelques jours, de quelques roucoulements médiatiques et de beaucoup de clics pour obtenir du gouvernement qu’il abandonne son projet de taxation de 60,5% des plus-values en cas de revente des parts d’une société. Le mouvement a été rapidement relayé dans la presse et sur le Web. Il a séduit début octobre 42 000 internautes sur Facebook et le hashtag #geonpi est passé en tête des plus utilisés en France sur Twitter, soulignant le succès médiatique de cette fronde 2.0. Une mobilisation rapide ainsi que de bons relais dans la presse (irrémédiablement liés) auront suffi à faire reculer le gouvernement.
La « Saison de la colère » ou la rhétorique légitimante
Malgré ce succès, on peut interroger la stratégie communicationnelle du mouvement, sur laquelle repose son envolée médiatique. Il semble que la rhétorique des pigeons était destinée à légitimer tant la révolte digitale de ses membres que leur rôle économique dans la société française. Cette fronde entrepreneuriale s’est déroulée dans une période de crise économique et sociale au cours de laquelle se sont déjà épanouis plusieurs mouvements sociaux tels Les Indignés. Leurs revendications, ainsi que la défense de leurs intérêts individuels (plus que collectifs…), restent donc solidaires de la tendance de l’époque. La reprise du slogan du mouvement Anonymous dans leur propre slogan, « We are Pigeons », participe également de cette recherche de légitimité, avec la volonté d’être identifiés à un mouvement de contestation.
Le plumage ne fait pas le pigeon
Mais la nature de cette rhétorique conserve une certaine ambivalence : pourquoi s’appeler les Pigeons, un terme qui, contrairement aux Indignés, n’a aucune connotation noble et citoyenne mais est associé à la naïveté et à la bêtise ? Choisir ce nominatif peut être compris comme une volonté de se défaire de toute fierté, que proclament les mouvements contestataires, pour jouer davantage sur l’humour et l’auto-dérision. Cette rhétorique est dans ce sens paradoxale : quand elle dévalorise, elle légitime. Son caractère subversif est très fort ici : la légitimation passe d’habitude par la dévalorisation de l’adversaire plutôt que de soi-même. La dévalorisation, qui aboutit dans ce contexte à une rhétorique de la victimisation, est destinée à légitimer les revendications des pigeons. La Présidente du Medef a évoqué dans un interview à L’Express le « racisme anti-entreprise » (bien qu’il n’y ait jamais eu ni diffamation, ni injure, ni discrimination), on parle dans la presse de « patrons-martyrs », ces entrepreneurs qui payent le coût de la crise économique pour les autres. Dans l’édition du Téléphone sonne consacrée au mouvement des Pigeons sur France Inter, on a pu entendre des termes comme « sanctionner », « fustigés », « condamnés ».

Le slogan « Ils ne se syndiquent pas. Ils ne manifestent pas. Ils ne menacent pas. Ils ne posent pas de bombes. Ils préfèrent créer de la richesse» (notez la belle allitération en « ss » du roucoulement du pigeon) témoigne bien de cette volonté de légitimer à la fois la révolte, dans les quatre premières phrases, et le rôle économique des entrepreneurs, dans une conclusion détachée visuellement et symboliquement des quatre négations. La rhétorique de légitimation devient ainsi un exercice de communication intimement lié à la reconnaissance d’une utilité sociale dans l’espace public. Les entrepreneurs souffrent en effet de la réputation qu’ils ont d’entretenir davantage une vision spéculative qu’une réelle volonté d’entrepreneuriat durable. Avec ce mouvement contestataire, les chefs d’entreprise ont eu l’occasion de démentir ces préjugés pour rappeler leur rôle majeur dans l’innovation et la création d’emplois en France. Les Pigeons se sont également défendus en invoquant la « réalité européenne », qui montre que l’imposition des plus-values en France (34,5% à la fin du quinquennat de Sarkozy) est une des plus élevées d’Europe et du monde (0% en Belgique et en Suisse, 26% en Allemagne, 22% en Angleterre). Jouer la carte européenne alors même que l’Union traverse une crise économique et politique qui remet en cause sa propre existence n’est pas inintéressant : dans ce mouvement fédérateur qu’insuffle l’Union Européenne, la comparaison avec la législation des autres pays membres donne une certaine légitimité aux revendications des Pigeons…ce qui donne en même temps une légitimité à la poursuite de la construction européenne !
En révisant son projet de loi, le gouvernement a reconnu la légitimité des revendications et la contribution à la richesse du pays du corps patronal français. Et quand Pierre Moscovici, Ministre des Finances et du Budget, déclare au JT de 20 heures de France 3 : « Il ne s’agit pas de reculer mais de bouger, quand ça va dans le bon sens et quand une revendication légitime s’exprime il faut l’entendre. C’est ce que nous avons fait. », il proclame et sacralise cette légitimité.
Du plomb dans l’aile
Mais celle ci pose plusieurs problèmes. Il semble étrange de constater que ce mouvement n’a pas été arrangé par les organisations patronales, comme le Medef par exemple. Cet intermédiaire lui aurait sans doute donné plus de légitimité que l’agence de communication digitale YOOPS, qui s’est chargée de la création du site « defensepigeons.org ». Cette forte mobilisation sur les réseaux sociaux qu’a suscitée le mouvement (72 282 internautes sur Facebook aujourd’hui) interroge alors la nature de cet engagement et donc sa légitimité : il semble plus facile de rassembler 72 000 personnes sur Facebook que dans la rue. Certes, Internet et la révolution numérique redonneraient le pouvoir de la démocratie directe aux citoyens internautes. Mais la possibilité d’un débat 2.0 annonce également l’appauvrissement de l’engagement citoyen, qui se réduit à quelques clics. A terme, cette “République des réseaux” serait un progrès quantitatif du débat démocratique mais sûrement pas qualitatif.
 
Margaux Le Joubioux
 
Sources :
Site du mouvement des Pigeons
Les entrepreneurs sont-ils à plaindre ? France Inter – Le téléphone sonne
Pourquoi est il si difficile de plumer le capital ? Du grain à moudre – France culture
La République des réseaux de J.Rognetta J.Jammot et F.Tardy.

Société

JO de Londres 2012 : la communication maîtrisée des athlètes français – L’exemple Teddy Riner

 
Cette photo restera sans doute gravée dans les mémoires comme l’un des emblèmes des JO de Londres 2012. Teddy Riner, maître incontesté du judo français, rouleur-compresseur de plus de 100Kg auquel rien ne résiste. Une image, un symbole.
Mais cette photo est aussi l’illustration de la communication sans faille des athlètes français durant ces JO. Dès le début du mois de juillet, rien n’a transpiré de la part des sportifs, focalisés sur leur entraînement. Durant les trois semaines d’euphorie londonienne, les images diffusées sont celles des chaînes de télévision possédant les droits de retransmission des jeux. Vous l’aurez remarqué alors : impossible de trouver des vidéos amateurs sur Youtube ou Dailymotion. Néanmoins, qui n’a pas remarqué le comportement exemplaire, sportif, éthique, moralement sans erreur des  athlètes tricolores ? Quand les Chinois sont accusés de tricherie et les Anglais de favoritisme, un calme absolu règne dans le service « communication de crise » du stand français. Alléluia !
Pour illustrer ce propos, prenons un exemple, au hasard Teddy Riner.
Teddy Riner, 23 ans, originaire de Guadeloupe, quintuple champion du monde de judo dans la catégorie poids lourds, champion d’Europe, médaillé de bronze à Pékin en 2008, et élève à Sciences Po Paris. La tête et les jambes : un exemple de réussite « à la Française ».
Depuis 2008, il clame haut et fort son désir de revanche, sa volonté inébranlable de domination du podium. Il devient un des sportifs français les plus attendus de ces jeux. Le 3 août 2012, il est là. A 10h30, il apparaît sur France 2. Côté internet, c’est « un de ses amis proches » (termes utilisés par l’utilisateur) qui prend le contrôle de sa page Facebook pour commenter les exploits du champion. Et c’est parti pour une journée de combats, d’adrénaline, de commentaires (plus ou moins pertinents), de soutien, de posts, de cris, de larmes, entrecoupés de pages de publicité. Parlons-en de ces pages de publicités. Fin du premier combat de Teddy Riner. Jingle de France 2. Et là, Teddy réapparaît et exécute une prise de judo. Reprise des hostilités ? Que nenni ! L’athlète s’empare d’une bouteille au contenu d’un bleu suspect et s’en abreuve avant de la passer à un autre olympien. Powerade se positionne comme « la boisson pour le sport officielle des Jeux Olympiques de Londres 2012 ». Et participe par-là à la construction de l’image des athlètes qu’elle emploie. Teddy Riner, omniprésent dans et en dehors des tatamis. Dans les intervalles entre les combats sont aussi glissés des reportages sur l’intéressé : sa vie, son œuvre ? Presque ! La vision qu’en a son entourage : son entraîneur, ses camarades de douleur (surtout pour eux la douleur apparemment !), sa famille. Focus est fait sur les réactions de sa maman durant les premiers combats : entre joie et fébrilité, on tente de faire oublier qu’il manque pour l’instant les sentiments du judoka. A l’issue (heureuse, bien sûr) de la finale, c’est (enfin) la relâche pour Teddy Riner : embrassades, autographes, interviews, photos. Les médias s’en donnent à cœur joie et le sportif n’est pas en reste. En effet, dans sa tactique cette année, le jeu avec le public et les médias, dont il est si friand, n’est pas au programme. Rigueur et sobriété sont les maîtres-mots. Ils le sont tout autant pour son entraînement que pour  sa communication tout au long de ces semaines londoniennes. Et il en est de même pour l’immense majorité des athlètes français. Alors, hasard, mise au point ou requête de la commission olympique ?
Quoiqu’il en soit, cette communication à l’unisson des sportifs tricolores sera unanimement remarquée. Une communication contrôlée, qui recentre les sportifs sur leur discipline. Une communication qui cadre parfaitement avec les attentes post-coupe du monde de football. Une communication adaptée au contexte socio-économique actuel. Maîtrisée, vous disiez ?
(1) Pour plus d’informations sur les liens entre le CIO et les réseaux sociaux :
(2) Pour information, Teddy Riner fêtera son titre olympique à Levallois le 8 septembre prochain
 
Julie Escurignan

Bernard de la Villardière
Les Fast

L’avis privé des personnes publiques

 
Dans la vie de tous les jours, sur votre compte facebook ou twitter, vous racontez votre vie, vous partagez des liens, des idées, et souvent vous émettez des avis et des opinions. Surtout en cette période politique cruciale : on voit fleurir les statuts ou les tweets de soutien à tel ou tel candidat(e) à la présidentielle.

Si vous pouvez faire tout  cela sans scrupule, c’est que vous n’êtes pas une personnalité publique ! En effet, suite à un tweet de Bernard de la Villardière qui, semble-t-il, montrait ses positions en matière politique, M6 a rappelé à l’ordre ses salariés, et en particulier ses animateurs et journalistes les plus connus. Dans un courriel, la direction d’M6 leur demande de « ne pas exprimer d’opinion politique personnelle » sur leurs comptes sociaux. Elle leur rappelle aussi que leurs tweets et statuts doivent « loyauté » à leur chaîne : il n’est pas question de critiquer un programme d’M6 par exemple !
Sur twitter, Bernard de la Villardière fait face à de nombreuses critiques et se défend d’avoir exprimé son opinion politique. « Un commentaire vaut-il prise de position ? Non ! », écrit-il.
La question est tout de même délicate : le compte twitter ou facebook d’un individu est le sien : pourquoi n’aurait-il pas le droit d’émettre sa propre opinion ? On voit d’ailleurs souvent dans les profils twitter la phrase suivante : « mes tweets n’engagent que moi ».
Alors, un tweet n’engage-t-il que soi ? Où est donc la limite entre vie privée et vie publique, entre vie professionnelle et vie personnelle ?
En attendant d’avoir la réponse à cette question, profitons de pouvoir écrire librement sur nos réseaux sociaux, nous, pauvres mortels inconnus !
 
Claire Sarfati
Crédits photo : ©B. de la Villardière

FranceTV-Info-iPhone
Société

Francetv-info : l’information hybride

 
Voilà quatre mois que Francetv-Info.fr a fait son apparition sur le Web (et sur les smartphones). Une plateforme aux promesses ambitieuses qui s’inscrit dans le prolongement des évolutions médiatiques récentes.
Il s’agit d’une plateforme lancée par France Télévision avec l’envie de permettre à l’internaute de suivre l’actualité au moment même où elle se passe. L’accès au site ne nécessite pas de s’inscrire. Concrètement, dans la lignée de Twitter, on peut suivre un fil d’actualité constitué de courts messages émanant d’une équipe de journalistes et de points de bilan faits régulièrement sur l’ensemble des sujets chauds. Comme cela est possible sur Twitter, chaque post commence par un hash tag qui permet de retrouver rapidement les informations que l’on veut consulter. La plateforme veut ainsi proposer de l’actualité « sur mesure », c’est-à-dire que l’internaute peut aller directement aux informations qui l’intéressent via le mur d’actualité ou en allant sur les pages et les onglets qui regroupent les sujets qui font l’actualité sous formes d’articles plus longs et plus détaillés ou encore en parcourant les pages dédiées aux régions. Francetv-info tire ainsi profit du vaste réseau de rédactions de France Télévision puisque chaque région et chaque thème a son propre flux d’informations. Autre innovation, on peut directement interpeler les journalistes en leur envoyant une question ou une remarque. Là encore, on est dans le prolongement de Twitter et cela contribue au « sur mesure » prôné par Francetv-info.
Ainsi, Francetv-info propose de l’information en continu en mettant à disposition un journaliste qui répond en live aux possibles messages des lecteurs, des articles de fond, des liens vers d’autres sites d’analyse d’actualité ou encore des photos et des vidéos. C’est donc un hybride entre les chaînes télévisuelles d’information en continu et Twitter. De ces deux médias, Francetv-Info garde le foisonnement et l’ubiquité. Des chaînes d’information, Francetv-info conserve la légitimité et la crédibilité. Enfin, de Twitter, Francetv-info garde l’interactivité, la proximité avec les journalistes et la possibilité de ne voir que ce que l’on veut. Francetv-info cherche ainsi à réduire l’asymétrie qui existe entre journalistes et curieux autour du traitement de l’information.
 
Thomas Millard

Michaël Llodra
Flops

Double faute

 
Le sport est, on le sait, un élément culturel qui est symbole de valeurs, et ce sous toutes ses formes, collectives ou individuelles. Parmi les sports les plus « nobles » qui existent, le tennis culmine en tête. On recense près de 30 millions de pratiquants licenciés rien qu’en Europe, et les tournois du Grand Chelem font partis des grands événements sportifs annuels, mobilisant des millions de téléspectateurs chaque année.
Mais malgré l’atmosphère classieuse qui enveloppe le monde très fermé des tennismen professionnels, nous assistons de temps en temps à quelques petits débordements, qui nous rappellent à chaque fois que rien ni personne n’est à l’abri de la « boulette ».
Dernièrement, c’est le français Michaël Llodra qui en a fait les frais. Lors de son match dimanche contre Ernests Gulbis durant le tournoi d’Indian Wells, il s’est laissé emporter face à la pression et s’est calmé les nerfs verbalement sur un groupe de supporters chinois, lâchant un assez indélicat « fucking chinese » à leur encontre. Un journaliste présent a immédiatement tweeté l’événement, et le pouvoir de viralité de Twitter a fait le reste. L’info s’est répandue comme une trainée de poudre, et en récompense, le joueur français a gagné une amende de 2500 dollars pour « abus verbal » et « obscénité audible », ainsi qu’un sale coup à sa réputation.
Evidemment, face à ce torrent de protestation, Llodra a décidé de réagir. Il a rencontré un journaliste chinois afin de présenter ses excuses, mais aussi beaucoup plus. En effet, Michaël Llodra a justifié ses propos d’une manière pour le moins inhabituelle. Il aurait déclaré ceci au journaliste : «Mes mots n’étaient pas contre la Chine. J’aime les Chinois. Je pourrais tout à fait faire l’amour à une Chinoise.» Ces propos, rapportés par le New York Times, ne ressemblent pas vraiment à ce que les personnalités sportives ont l’habitude de dire lorsqu’ils se retrouvent dans des situations similaires. Car si l’affaire Llodra est à suivre, ce n’est pas la première fois qu’un joueur dérape en plein match, sous l’œil et les oreilles des médias.
Cet incident n’est pas sans rappeler la mésaventure de Joachim Noah, fils de Yannick, lors d’un match qu’il disputait avec les Chicago Bulls en mai 2011, il y a un peu moins d’un an. Le joueur français avait été filmé en train de prononcer une insulte homophobe envers un supporter qui avait de toute évidence dû avoir une conversation particulière avec Noah lors de ce match. Celui-ci avait d’ailleurs écopé d’une amende de 50 000 dollars, et s’était excusé auprès de la presse, expliquant, tout comme Llodra, qu’il avait eu cette réaction « dans le feu de l’action ».
Et bien sûr impossible d’oublier le drop-kick légendaire d’Eric Cantona sur un supporter lors d’un match qu’il disputait en 1995 pour Manchester United, alors qu’il était au sommet de sa gloire. S’en était suivi une débâcle journalistique autour du « kung-fu kick » que le joueur avait préféré ignorer, lors d’une conférence de presse où il éclaboussa les journalistes de sa poésie.
Finalement, ces incidents, malgré le mal qu’ils causent au sport et aux joueurs qui les causent, montrent bien que malgré la surmédiatisation et le statut d’idole dont ils peuvent jouir parfois, les sportifs restent des êtres humains qui peuvent craquer sous la pression. Toutefois, ce qui les différencie des individus lambda, c’est que lorsqu’ils vont trop loin, tout le monde le sait. Ce doit être la rançon de la gloire.
 
Emilien Roche
Crédits photo : ©Panoramic

1
Des-paroles-et-des-actes-les-politiques-s-y-bousculent_image_article_paysage_new
Société

Débats télévisés et présidentielle : quelle incidence du format sur le discours des candidats ?

 
Qui dit campagne présidentielle dit émissions de campagne : « Paroles de Candidat » sur TF1 et « Des paroles et des actes » sur France 2 reçoivent les principaux candidats à la présidentielle. Emissions de prime time, audiences fortes, commentées en live sur Twitter par des milliers de personnes (hashtags : #pdf #dpda). Elles sont des occasions uniques pour les candidats de faire entendre leur « parole » au plus grand nombre.
« Paroles de français » sur TF1, renommée « Paroles de candidat » pour la campagne présidentielle, est une émission où se confrontent des participants soigneusement choisis et un présidentiable. Ce dispositif est l’occasion pour le candidat de rebondir sur de nombreux sujets : agriculture, sécurité, enseignement, etc. Ainsi ce n’est pas Laurence Ferrari qui interviewe réellement le candidat, mais des Français, réduits à une simplicité facilitante pour l’émission : un homme, un problème, un sujet, une solution présentée par le candidat. Des journalistes sont aussi présents pour titiller les présidentiables sur des sujets plus complexes comme l’économie. L’image d’un dialogue simple entre le candidat et les personnes présentes donne à penser au spectateur que celui-ci est proche des problèmes des Français. Il ramène pourtant à une vision un peu populiste de la politique, à savoir que chaque problème personnel est forcément lié à un problème important de la société.
« Des paroles et des actes » sur France 2, présentée par David Pujadas, est une émission « pot-pourri », à la fois entre le talkshow à l’américaine, l’émission d’économie pure et le débat incisif entre journaliste et candidat ou candidat contre candidat. En ce sens, elle semble être un résumé rapide de toutes les épreuves que les candidats ont à passer dans cette campagne. L’aspect talkshow est donné par l’interview du début par la journaliste Nathalie Saint-Cricq : on attaque François Hollande sur son poids, Nicolas Sarkozy sur son « casse-toi pauvre con ». Cela est suivi par le questionnaire économique pointu de François Lenglet, puis par une interview plus institutionnelle avec Fabien Namias. Le présidentiable se retrouve ensuite à débattre avec un contradicteur, avant de reprendre l’émission point par point avec Franz-Olivier Giesbert et Hélène Jouan. En ce sens, c’est un bilan complet pour le candidat : image médiatique, économie, idées sur la politique et les institutions, capacité à débattre. Ce format semble pourtant diviser la politique en strates, rendant parfois difficile la vision d’un projet de société complet de la part des candidats.
Ces émissions très regardées semblent être un passage obligé ou du moins voulu par tous les candidats : c’est le cas d’Eva Joly, dont le porte-parole Sergio Coronado dénonce « la logique sondagière » de France 2 qui n’a pas encore invité la candidate. On peut conclure par le fait qu’il est étonnant de remarquer qu’à l’heure du digital, la télévision semble encore être le principal média de la campagne présidentielle. Il est d’ailleurs le seul à être soumis à des temps de paroles (cf Les images et la spontanéité forcée, Thomas Millard, Asymétrie, December, 5th 2011).
 
Ludivine Preneron
Crédits photo : ©Ladmedia.fr

2
Oiseaux pris en photo en contre-plongée volant tous ensemble
Société

Twitter, la parole qui fourmille

Jeudi soir, Marine Le Pen était invitée de l’émission politique de France 2 orchestrée par David Pujadas et intitulée « des Paroles et des Actes ». Cette émission a pour but de faire passer les candidats face aux mêmes chroniqueurs pour qu’ils puissent expliquer et défendre leurs propositions de manière équitable. Ainsi, comme c’est l’usage dans cette émission, la candidate du Front National a fait face aux différents chroniqueurs (Nathalie St Cricq, François Lenglet et Fabien Namias) et à deux contradicteurs (Henri Guaino et Jean-Luc Mélenchon). Jusqu’à 5,9 millions de téléspectateurs[1] ont assisté à cette somme d’échanges plus ou moins instructifs.
Parallèlement, sur Twitter, le hashtag[2] « #dpda » a été très employé. Plus de 11.000 twittos sévissaient sur la toile et plus de 42.000 tweets avec le hashtag de l’émission ont ainsi été postés. Ces Tweets étaient de natures très diverses. Certains étaient émis par des journaux et renvoyaient à des articles en ligne relatifs à ce que disaient les protagonistes du débat pour permettre de mieux comprendre ce qui se disait. D’autres étaient émis par des journalistes ou des acteurs politiques et apportaient une analyse sur le fond ou sur la forme du débat. Enfin, une bonne quantité de tweets provenaient de simples téléspectateurs à la culture politique plus ou moins fine qui regardaient le débat en attendant l’arrivée de Mélenchon avec une excitation pareille à celle que l’on ressent quand on attend le début d’un match de foot. A cause du petit nombre de caractères possibles pour chaque message (140), certains sonnaient comme des maximes politiques ne pouvant souffrir d’aucune objection. Il y avait aussi beaucoup de messages pour commenter la prestation de David Pujadas ou la chemise à carreaux d’une fille dans le public.
Twitter s’est ainsi présenté comme un prolongement de l’émission. Une plateforme interactive où chacun peut donner son avis immédiatement à tout le monde. Pas de hiérarchie ni d’encadrement des twittos, juste un fourmillement de paroles. Mais tellement de tweets qu’on ne peut en aucun cas tous les voir. Quelqu’un suggérait de faire comme dans l’émission qu’animait Marc Olivier Fogiel sur France 3 il y a quelques années : mettre en place un bandeau en bas de l’écran de France 2 pour diffuser les tweets à tous les téléspectateurs. Imaginez la vitesse de défilement des tweets ! Et si on sélectionnait les meilleurs ? C’est contraire à l’idée de Twitter qui consiste à réduire les asymétries de parole… Et d’ailleurs cela poserait des problèmes de réalisation.
 
Thomas Millard

[1] Francetv.fr

[2] Thème du tweet précédé du symbole « # » pour en faire un mot clé. Ainsi, en un clic, on peut consulter tous les messages émis par les twittos du monde entier qui se rapportant à ce thème.

Le compte twitter de la campagne de Sarkozy en 2012
Société

@PrésidentdelaRépublique

Ça y est, la campagne est officiellement lancée ! Nicolas Sarkozy vient de se déclarer candidat à sa réélection à la tête de l’Etat. Les communicants sont contents. On peut enfin activer la machine, sortir l’artillerie, bref se servir de tout ce matériel sur lequel on lorgnait depuis de longs mois. Ainsi, est ouvert depuis le 15 février le nouveau compte Twitter du Président de la République (@NicolasSarkozy), sur lequel il nous fallait impérativement aller faire un petit tour.
Notre regard s’est évidemment porté tout d’abord sur le papier peint. Rien de surprenant de ce côté là : un beau bleu monochrome, tout à fait UMP, tout à fait rassurant, mais un peu électrique, un peu numérique parce qu’on est quand même sur Twitter. La photo, ensuite, ne nous a pas étonnés non plus, c’est celle au bord de cette mer d’huile sur laquelle la France entière rêve de naviguer, au calme, vers de lointains et prometteurs horizons, guidée et sécurisée par ce Président serein et tout entier habité par sa fonction. Le slogan va d’ailleurs dans le même sens. « La France forte », cela accompagne bien la figure du capitaine et on serait presque entièrement rassuré sans un petit bémol, d’ordre typographique. « Forte » est en effet plus gros, beaucoup plus gros que « France ». Le nom est plus petit que son adjectif qualificatif, du coup la « France » paraît être moins forte que « forte ». Mais, ceci est un détail et il est temps de passer aux choses sérieuses.
La chose sérieuse, c’est la spécificité de la communication élyséenne sur Twitter. Là, on a été surpris ! Dès l’arrivée sur le profil du candidat, on vous indique que ce n’est pas lui qui vous parle : « Compte officiel de Nicolas Sarkozy. Ce compte est piloté par mon équipe de campagne », du moins la plupart du temps ( « Mes tweets personnels seront signés -NS »). Évidemment, on s’en serait douté, et c’est justement un des intérêts de la manœuvre. Nicolas  Sarkozy est honnête avec vous. Comme en 2007, il dit ce qu’il fait et il fait ce qu’il dit. Mieux encore, il est très occupé en ces temps de crise et Twitter n’est évidemment pas sa priorité. Il est responsable, déterminé, travailleur. Ce n’est pas un geek immature et à demi oisif. Néanmoins, il est aussi moderne. Il tweete de temps à autre, pour remercier @whitehouse notamment. Et, cette rareté, c’est aussi la distance, la distinction. Ce qui est rare est cher, précieux. De même que ce qui est loin. Ainsi, les guillemets encadrant les phrases clés de son discours les isolent-elles dans une solennité en contraste avec la  trivialité des autres posts sur le compte. Le discours est grandi, isolé, comme doit l’être le pouvoir, surtout présidentiel.
Globalement, c’est de la bonne com’, et dans com’ il y a aussi communion. La force du candidat Sarkozy est peut-être avant tout là, et ça se retrouve sur Twitter. « J’aime vos valeurs, j’aime vos montagnes. », « c’est par le travail et l’effort que nous garantirons notre modèle social », « s’il y a un blocage, je me tournerai vers le peuple et je lui demanderai de trancher », ces phrases extraites du discours d’Annecy ont été twittées en direct sur le compte officiel par l’équipe de campagne. Pas de chiffres, pas de pure rationalité mais de la croyance. Être en accord avec l’idéologie ou plutôt avec les idéologies, c’est la méthode ici. Ainsi, on retrouve toutes les thématiques qui fondent l’inconscient de la droite française mais aussi de beaucoup d’autres citoyens : traditionaliste, avec les montagnes, libérale, avec le travail et l’effort, ou gaulliste, avec la référence au référendum et au système de protection sociale. Ces thématiques, le Chef de l’État en devient en cette campagne l’incarnation, le garant. On retrouve la figure du héros, c’est-à-dire de l’homme qui porte sur lui les valeurs d’une société et les fait vivre. Ça avait marché en 2007, avec « la valeur travail » notamment. Nicolas Sarkozy était alors un homme frais, comparé à Jacques Chirac surtout, dont il avait pris grand soin de bien se démarquer. Mais, le contexte est désormais différent et on peut se demander si, aujourd’hui très bas dans les sondages, il a les moyens et le temps d’incarner de nouveau ces valeurs, de se refaire héros pour aller battre François Hollande, le candidat normal, le 6 mai prochain ? De la réponse à cette question dépend peut-être grandement le résultat de cette élection.
 
Romain Pédron

3
Débat des candidats républicains aux présidentielles à Las Vegas en 2011
Com & Société

En janvier : l'Odyssée républicaine débute…

Aux États-Unis, la campagne pour les présidentielles de 2012 est lancée et on  voit poindre les challengers potentiellement éligibles au milieu d’une pléthore de prétendants.
Si Barack Obama ne s’est pas encore prononcé quant à une probable candidature pour briguer sa propre succession, c’est le branle-bas de combat du côté des Républicains puisque les primaires vont commencer le mardi 3 janvier.
Au gré des affaires, les candidats tombent et laissent place à de nouveaux favoris : si Herman Cain, mis hors course pour cause de scandales sexuels était en bonne place dans les sondages, son éviction a redonné de l’espoir aux candidats aspirants à l’investiture de leur parti. À l’heure où nous écrivons, ils sont sept, sept à pouvoir prétendre affronter le candidat démocrate, et parmi eux, trois fringants sexagénaires, sinon septuagénaires, prêts à se lancer dans la bataille des primaires qui ne consacrera qu’un unique vainqueur.
Newt Gingrich, 69 ans, Mitt Romney, 64 ans et enfin le doyen Ron Paul âgé de 76 ans ont pour point commun d’être les candidats les plus âgés de la campagne. Si ce point pourrait paraître anecdotique, on peut toutefois s’interroger sur ce phénomène et son incidence sur la future campagne électorale. En effet, depuis 2008 et la campagne victorieuse d’Obama, les codes ont changé. Ces seniors sont-ils capables de s’adapter ? Quelles stratégies seront mises en place pour l’emporter ?
 
Une campagne gagnée sur la toile
 
Si l’élection d’Obama en 2008 porte aux nues tant un candidat que des valeurs qu’il incarne telles que le dynamisme, la nouveauté ou la jeunesse, elle pose aussi de nouvelles questions en termes de communication. La campagne d’Obama est en effet sans précédent, donnant au marketing politique de nouveaux codes qui font souffler un vent de fraîcheur sur la campagne, l’affluence aux urnes témoignant de cette ferveur citoyenne. Cette campagne a su toucher les jeunes (66% des 18-25 ans ont offert leur vote à Obama) et les minorités, qui avaient le sentiment d’être délaissés, en parvenant à entrer dans leur quotidien et à les atteindre par le biais de la toile.
Vraie révolution politique qui s’est massivement fondée sur les nouvelles techniques de communication, Obama est parvenu à faire entrer sa campagne dans l’Histoire. Mû par un formidable plan de bataille, Obama a conquis la toile où la résistance de son ennemi était dérisoire. Les réseaux sociaux furent son premier porte-voix : les désormais traditionnels Twitter et Facebook associés à des dizaines de sites communautaires se firent l’écho de cette campagne et lui apportèrent un grand soutien. Avec son propre réseau social MyBarackObama.com, le candidat impulse un militantisme virtuel et efficace qui se retrouve sur une plate-forme gérant les réunions, l’organisation des meetings, le partage des informations entre ses soutiens et à travers le pays : grâce à « MyBo » les actions sur le terrain et sur le net se multiplient. Énième ressort ; son site officiel ObamaBidensite.com, extrêmement actif ET interactif. En un mot : le concept d’échange au carré.
Notons la réactivation de ce site pour la prochaine campagne (on ne change pas une équipe qui gagne !). L’« e-publicity », les plates-formes dédiées aux vidéos de soutien du candidat, la diffusion massive d’informations par SMS sont d’autres vecteurs utilisés par l’équipe d’Obama en 2008.
Ce phénomène nouveau dit du « grassroots » (littéralement les « racines »), exprime le mouvement du « bottom up » au cœur de la stratégie de communication politique d’Obama : l’émulation doit venir des citoyens et être portée par eux.
 
Des seniors prêts à s’y mettre ?
 
La question semble rhétorique : par la force des choses, chaque candidat se doit d’être présent sur ce nouveau terrain, au risque d’être tout simplement mis hors course avant même le coup d’envoi de la campagne. Si les démocrates bénéficient d’une bonne avance dans leurs infrastructures en ligne, les républicains ne sont pas en reste et ont habilement rattrapé leur retard, reconnaissant la maîtrise d’internet comme le nerf de la guerre.
Une présence quasi-formelle est nécessaire sur Twitter ou Facebook, un site officiel s’impose, et ça, les républicains l’ont compris.
Un candidat aussi vieux soit-il n’est en aucun cas un senior lambda qui rechigne à se mettre à la technologie, il est avant tout une bête politique prêt à tout pour gagner. Gageons donc que l’équipe de jeunes communicants dont le futur candidat investi sera bardé se chargera de pallier ses carences si, d’aventure, il en présentait.
 
Des politiques trop conservateurs ?
 
On pourrait donc s’inquiéter pour l’ensemble du parti plus que pour ces trois candidats.  Les conservateurs ont accusé un sérieux retard et cette image de parti courant après le train, acquise en 2008, risque de leur coller à la peau.
Ce qui pourrait faire la différence entre les candidats serait leur manière d’investir ces outils. Les termes « voter », « réseaux sociaux », « Obama » formaient le même paradigme en 2008 ; voter s’était fait avec le même naturel qu’utiliser Twitter pour une bonne partie des citoyens et Obama fut le candidat de ces « virtual citizen ». Le défi de 2012 pour Obama : réitérer l’exploit. Celui des républicains : pouvoir y prétendre.
Pourtant se mettre à jour est-il suffisant pour remporter l’élection ? En effet pendant que les républicains se démènent pour se mettre à niveau, il est certain qu’Obama et ses équipes continuent de perfectionner leur plan de bataille et réservent des surprises (à l’image du site MyBo, devenu une référence en la matière) en terme de communication politique  pour 2012.
La bataille sera rude et épique, mais il est certain que tel Ulysse dans l’Odyssée, le prétendant qui voudra éliminer tous ses concurrents devra user de ruse et de finesse pour gagner le cœur de l’Amérique.
 
Marie Latirre
 
Crédits photos :
©Ethan Miller/Getty Images North America
©Twitter
©Shannon Stapleton, Reuters
 

Archives

Jakadi qu'il fallait tweeter

Jakadi que le “live-tweet” est l’avenir du journalisme
 
Le 30 novembre dernier, les chargés de communication du Prix Pulitzer ont laissé entendre sur leur site internet qu’il y aurait quelques changements pour l’année 2012…
Pour les non-initiés, le Prix Pulitzer est une récompense américaine décernée chaque année dans plusieurs grands domaines, dont le journalisme ; il s’agit d’ailleurs d’une référence au sein de la profession. S’il existe aujourd’hui 14 catégories relatives à la presse, allant du commentaire à la critique, en passant par la photoreportage, ou le dessin, celle qui devrait connaître les changements les plus profonds est la catégorie « Breaking news », ou « infos de dernière minute ». En effet, le communiqué mentionnait l’importance du « real-time reporting » : en clair, ce qui fait une bonne information, c’est sa fraîcheur, le fait qu’elle soit délivrée en temps réel. « The revised definition for Breaking News focuses on reporting that, « as quickly as possible, captures events accurately as they occur, and, as time passes, illuminates, provides context, and expands upon the initial coverage. »
A première vue, rien de particulièrement nouveau ni bouleversant. S’il reste difficile pour des journaux papiers d’actualiser leurs contenus à la minute, les chaînes de télévision d’information en continu telle que BFM ou itélé, ou même simplement les supports internet des grands journaux, font une place de plus en plus grande au « real time » : la toute primeur de l’info devient un gage absolu de qualité. Elle est ainsi livrée brute, ou à peine dégrossie ; et, comme pour les produits agricoles, le consommateur apprécie qu’elle lui soit fournie de manière aussi directe que possible : moins il y a d’intermédiaires entre lui et le producteur de l’information, sa source première, mieux c’est.
Résumons : une information délivrée brute, de façon quasi-immédiate, par des hommes et des femmes de terrain. Qu’est-ce que cela vous évoque-t-il, sinon Twitter ? L’avenir du journalisme résiderait-il donc sur le réseau social ? Le « live-tweet » serait-il la forme journalistique de demain ? Se peut-il qu’un journaliste soit récompensé du Prix Pulitzer pour son activité sur Twitter ?
A priori, la grande révolution ne serait pas pour tout de suite : si le réseau social lancé il y a seulement 5 ans par Jack Dorsey comptait en septembre 2011 plus de 100 millions d’utilisateurs actifs, il n’est peut être pas encore assez popularisé. Son fonctionnement et même simplement son langage, si particulier, restent obscurs pour une grande majorité de non-initiés. Beaucoup apparaissent découragés à leur première utilisation et abandonnent rapidement leur compte après l’avoir créé, sans vraiment prendre le temps de comprendre ; d’autres se contenteraient de suivre l’actualité de leurs abonnements sans rien communiquer eux-mêmes. Pour le moment, Twitter demeurerait trop sélectif pour que l’on puisse parler de bouleversement effectif dans la pratique qu’ont Monsieur et Madame Tout-le-monde de l’information.
Notons cependant que si 40% des utilisateurs actifs s’inscrivent uniquement pour « voir ce qu’il se passe autour », sans contribuer au flux, cela représente malgré tout un public non négligeable. En outre, Twitter note sur son blog qu’un nombre de plus en plus considérable de journalistes se sert du réseau pour supplémenter leur « reporting efforts », « partageant des histoires et des images directement du front ».  Et Twitter de prendre pour exemple Brian Stelter, ou @brianstelter, reporter pour The New York Times et followé – à l’heure où je vous parle… – par 97 764 personnes. Son tweet sur la tornade de Joplin illustre parfaitement cette nouvelle forme de journalisme : un court texte clair et frappant, accompagné d’une photo partagée via Instagram, une plateforme internet permettant de mettre en ligne et diffuser des images depuis son ordinateur ou son Iphone (et bientôt depuis son Smartphone Androïd). Notons qu’elle est également utilisée par Facebook et Flickr…
Cela nous donne-t-il à tous la possibilité de devenir des journalistes ? D’abord, ces nouvelles pratiques modifient-elles vraiment la donne ? Chacun avait déjà les moyens de s’improviser journaliste via un blog, et certains grands reporters d’aujourd’hui ont d’ailleurs débuté ainsi. Twitter bouleverse cependant par l’extrême brièveté de ses posts (140 caractères maximum !), et parce qu’il permet d’actualiser en temps réel l’information. Elle est toujours plus fraîche, et toujours plus proche de sa source.
Il convient néanmoins que nous nous demandions quelle valeur accorder à des news délivrées si brutes et immédiates : s’agit-il réellement de journalisme, ou simplement de témoignages ? Qu’apportent-elles réellement ? Pour le moment, Twitter reste un outil de complément ; on continue à chercher une information plus détaillée et analytique dans les journaux, sur des sites internet ou à la télévision – et la signature d’un professionnel, d’une personne de métier, demeure un gage de qualité.
Mais demain ?
 
Elodie Dureu
Sources et liens :
Pulitzer.org – Digital Entries
Blog Twitter – One hundred million voices